Une autre semaine, un autre prime. Le temps passait beaucoup plus lentement qu’il n’en paraissait, mais au final, j’avais l’impression qu’une éternité c’était écoulée depuis mes premiers pas dans le nid de Cupidon. Et à mon avis, ce n’était pas une bonne chose. Plus vite l’aventure se terminerait, plus vite je pourrais sortir d’ici… Mais pour l’instant, je devais me contenter d’être là, de suivre la masse et d’agir en gentille petite candidate obéissante en allant me joindre au lot des candidats présent sur le plateau. Vêtu d’un simple jean, d’un t-shirt beige et d’un béret, je m’y rendis plutôt par contrainte que par envie, et allait m’installer à l’un des sièges vacants, ne remarquant même pas qui était mes propres voisins.

Nouveau prime, nouvelle occasion d'exposer l'un de mes T-shirts abordant une phrase ou une illustration hautement philosophique et intelligente. Il s'agit ce soir-là d'un panda aux gros yeux affolés globuleux, et d'un slogan choc: "sauvez un bambou, mangez un panda" qui s'étale fièrement sur ma poitrine et que je trouve à mourir de rire. Ou presque en tout cas. J'entre dans le salon et laisse mon regard vagabonder à la recherche d'une place où je pourrais m'installer jusqu'à ce que ce dernier s'arrête sur une sorte de diva blonde emprisonnée dans une robe d'un rose pétant. Pardon ? Je cligne des yeux, m'attardant quelques secondes sur le visage de la nouvelle venue, avant d'y reconnaître les traits masculins de Cooper. J'ai dû manquer un épisode, mais je finis par vaquer, d'un air indifférent, à mes propres occupations. Soit, me dénicher une place bien lotie. Après une brève analyse de la situation, je finis par choisir le coin d'un canapé jusque là inoccupé. Un sourire léger s'affiche sur mes lèvres quand Cupidon annonce le jeu de la soirée. J'ai une excellente mémoire, avec un peu de chances et de rapidité, je peux peut-être me débrouiller pas trop mal sur ce coup là.

Troisième prime pour une troisième semaine à laquelle je n'ai participé que d'un oeil, maladie oblige. J'avais beau souhaité tombé malade et être rapatrié sanitaire au début du jeu, je n'en ai, présentement, plus aucune envie. Au final, Fake Lover me botte assez, et je regrette largement la grippe carabinée qui m'a cloué au lit toute la semaine durant. Soit, inutile d'en faire toute une affaire. Le visage presque humain, je débarque dans le salon, maquillée comme la pire des putasses afin de cacher mes cernes abominablement sombres, sobrement vêtu, bien que la styliste ait passé quarante bonnes minutes à me dégoter des fringues assez moches pour mon actuelle gueule ravagée par la fatigue. La foule n'afflue pas encore, probablement sont-ils encore aux prises des esthét' qui s'occupent de nous en pré-prime. Sans ouvrir la bouche, je m'assoies seul dans un coin du canapé, le visage neutre. Et je le vois, là, Cooper, le ken de service, déguisé en meuf. Oh con. Je pouffe une seconde... Ta maquilleuse avait d'la merde dans les yeux Cooper? ...Et le fou rire s'empare de moi: impossible de me calmer. Je m'allonge presque sur le canapé, me tienne le ventre, essuie les larmes au coin de mes yeux: heureusement pour lui que le ridicule ne tue pas.

Attendant le début de la soirée, je sentis alors une main sur ma jambe. Oona. Ma partenaire me rejoignit sur le canapé où j'étais et j'étais bien heureux de la retrouver ce soir pour le prime. Nous formions une équipe, un couple et il était important de rester soudé dans ces moments. « Ca va bien. J'ai juste un peu peur du prime et des défis mais ça devrait aller. Après tout, j'ai survécu la semaine dernière. » Je riais, nerveusement. Mais Cupidon vint vite remplacer mes peurs par un soulagement soudain. Qui a dit quoi ? Ca je pouvais y participer et faire rempoter des points à mon équipe. J'espérais pouvoir être utile. « Bon, ça va. Ca devrait aller pour mes fesses ce soir. Et toi, ça va ? Et qu'est-ce qu'il se passe avec Cooper ? Je comprends pas. »

Je jetais un coup d’œil aux deux robes que j’avais déjà porté. Hors de question de les remettre évidemment, même si c’était mes préférés. Il me fallait trouver autre chose … Et il semblait que venir en jeans n’était pas vraiment une bonne idée non plus. Bref, je n’avais aucune idée de quoi mettre. Je me passais une main dans les cheveux, me rendant compte qu’il fallait que je m’occupe de ça aussi. Oh mon dieu … J’étais vraiment tout sauf ponctuelle … Finalement, je pris une jupe à volant et un haut serré. L’effet n’était pas mal, au fond. Quant à mes cheveux, je les nattais lâchement. Des fins cheveux venaient lécher mon visage. Un rapide coup d’œil dans le miroir et je me précipitais vers le plateau. Bien sûr, je n’étais pas dans les premiers … Paraissant plus calme que je ne l’étais vraiment, je m’asseyais dans un des canapés, près d’Elvis. J’avisais Cooper, un sourire très amusé sur les lèvres. Sympathique comme tenue. Le jeu que Cupidon proposait n’était pas mal non plus. « Je suis sûre que la tenue féminine t’irait très bien aussi Elvis. »

Tous les regards étaient jetés sur cette nouvelle forme hideuse qui fit son entrée dans la pièce. Voilà une bien meilleure idée pour attirer l’attention. Les trois quarts des candidats explosèrent de rire, tandis que lui, il avait gardé son calme habituel. Il ne voyait réellement pas pourquoi le jeune gaillard pourtant si viril et téméraire avait accepté ce genre de caprice de la part de cet ange complètement malade... rien de bien pire que de faire traverser un homme la dure épreuve du ‘’okama way’ comme le dirait nos amis japonais. Il se contenta seulement d’un léger sourire en direction de cette ‘’nouvelle candidate’’ complètement customisée, et écouta le nouveau défi de Cupidon.

Peut-être devrait-elle se sentir stressée, impatiente, apeurée. Peut-être, oui, aurait-elle dû ressentir quoi que ce soit face à ce troisième et éventuellement dernier prime. Cependant, ce n'était pas le cas. Elle n'allait pas bien, n'allait pas mal pour autant. Elle était neutre, blasée. Rien n'était différent de d'habitude. Si elle partait, elle partirait. Ça ne changerait rien de fondamental dans sa vie. Elle ne se changea pas pour la soirée, n'en voyant pas l'utilité. Elle se contenta d'ajouter une veste ainsi qu'une écharpe sur sa chemise en jean et elle fût prête. Cela dit, elle prit tout son temps avant d'aller sur le plateau. Parce qu'elle n'avait vraiment pas hâte de se retrouver dans un même endroit avec les autres candidats. Elle se servit un bon verre de jus d'orange, se prépara un sandwich tant qu'elle y était. Elle le dévora lentement, très lentement, puis se fuma une clope avant de décider qu'il serait peut-être temps d'aller à la rencontre des autres débiles. Et putain, elle n'était même pas si en retard que cela. Elle ne manqua pas l'annonce de Cupidon, tandis qu'elle s'asseyait sur le canapé, concernant le jeu qui allait suivre. Ouais, tant mieux pour lui.

En retard pour le prime, je tâche de fermer la sangle de mes chaussures autour de ma cheville le plus rapidement possible tout en regardant dans le miroir le résultat de cette demi-heure de préparation particulièrement éprouvante. Les cheveux lâchés, maladroitement coiffés (puisque je ne suis un manche en matière de coiffure), je souris et mes lèvres incendiaires tirent la tronche dans le reflet qu'elles me renvoient. Bon. Je lisse une dernière fois les plis de ma robe, réajuste le col et quitte en trombe la chambre. Je me précipite en courant dans les escaliers, traverse la maison d'un pas sautillant et précipité avant de finalement débouler sur les lieux du prime qui commence tout juste. Je m'installe sur un canapé au hasard, aux côtés de Caesar à qui je souris. « Enfin! Ça va mieux toi? » Je n'ai même pas remarqué Cooper-la-grosse-dondon assit non loin. J'aurais presque envie de chanter "diamonds are girl's best friend"

La rousse s'installa confortablement sur le canapé, croisant ses longues jambes, en se maudissant d'avoir mis une jupe, cela n'allait pas être pratique pendant le prime. Les candidats arrivaient un par un, et Cooper débarqua. La jeune femme dut se faire violence pour ne pas éclater de rire, Gabrielle tourna la tête, préférant s'enlever cette vision si dérangeante de Cooper. Puis Cupidon annonça qu'ils joueraient à qui à dit quoi ? Super, Gabrielle avait une mémoire de poisson rouge, c'était pas gagné. Sonny s'installa près d'elle. « Depuis un certain temps déjà. » . Oui elle se souvenait très bien qu'il avait écrit qu'il n'aimait pas sa nouvelle couleur. Cela, elle ne l'oubliait pas.

Évidemment, comme il fallait s'y attendre, mon arrivée très remarquée, déclencha une vague de fous rires auprès des habitants. Seul Lukas ne pourrait apprécier le magnifique spectacle. « Alors… Qu’est-ce que ça fait d’avoir un vagin ? » me demanda un type à qui je n'avais encore jamais parlé.  « Je ne sais pas. A toi de me le dire » Comme si c'était lui la fille par ici. Moore s'installa alors à mes côtés.  Je n'ai pas eu l'honneur de vous rencontrer mademoiselle, vous êtes magnifique. » Les autres y allèrent aussi tous de leur petit commentaire. Ils me trouvaient à tomber, forcément. Je passai alors ma main dans mes cheveux, tout en faisant un mouvement de tête, du style, 'L'oreal, parce que je le vaux bien'.  « N'est ce pas ? Je sais que je vous fais tous craquer. Ce soir, c'est moi la plus belle ! » Oui au fait, avais je oublié de vous préciser, qu'avant de venir, je m'étais sifflé trois ou quatre verres de whiskey? Le minimum, pour supporter cette soirée. Et au lieu de tirer la tronche, j'avais décidé de jouer le jeu à fond. Merde après tout. Et puis c'était ça ou massacrer tout le monde. Un autre type me balança une remarque, comme quoi ma maquilleuse avait de la merde dans les yeux.  « Chuuuut, t'es juste jalouse de ne pas être aussi jolie que moi »