Je n’avais jamais mis les pieds dans la chapelle. En fait, je me demandais si j’avais déjà mis les pieds dans une chapelle tout cours. Oui, non, je plaisante. Mais ce n’était pas arrivé souvent. Mais bon, aujourd’hui, j’en avais envie. Puis, je me dis qu’il ne devait y avoir personne dans cette foutu place. Alors enfin seule. Parce que depuis le début de la semaine, j’essaie d’être seule et je n’y arrive absolument pas. Rien à faire, toujours quelqu’un pour m’embêter. Après avoir réussit à me glisser à l’intérieur, je m’aventurai dans celle-ci, me disait que je pourrais bien dormir ici ce soir. Non, bon, il faisait beaucoup trop froid et la place me donnait plutôt la chair de poule. M’avançant dans la pièce, je remarquai une tête blonde. « Ah non, c’est pas sérieux. T’es partout où je vais ou quoi ? » m’exclamais-je fortement en reconnaissant Siomha. Je n’étais pas en colère qu’elle soit ici, simplement, j’avais l’impression que peu importe où j’allais, elle était là. Et je ne pouvais compter sur le fait que nous aurions une bonne et intéressante conversation, puisque la demoiselle parlait à peine. J’allai tout de même m’asseoir à ses côtés, soupirant légèrement. « Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu viens déclarer tes péchés ? » demandais-je, un sourire aux lèvres en regardant la jeune femme. J’avais presque retrouver mon humour moi.

Une chapelle. Cupidon devait être con. Il fout des jeunes gens à la recherche de sexe plus que d'air frais dans un lieu fermé, donne un lit pour deux et s'occupe bien à rendre les couples mixtes et il fout une chapelle? Comme s'il y avait véritablement des gens qui allaient regretter leur partie de baise et venir s'en excuser devant le seigneur? Blague. Non, Cupidon était juste con. Malgré tout, n'ayant rien de mieux à faire, elle avait décidé de visiter ce lieu étrange. La chapelle. Waouh. C'était glauque, en fait, comme endroit. Dire qu'il y en avait qui débarquait ici pour être en grande communion avec Dieu ou une connerie du genre. Bande de naïfs. Avec sept milliards de personne dans le monde, vous croyez qu'il a le temps d'écouter la moindre requête? Même pas besoin de poser la question, ce type, Dieu là, il n'existait pas. Perdue dans ses pensées un instant, elle reprit contact avec la réalité en entendant une voix l'accuser d'être partout où elle allait. Elle se retourna, observa cette personne. Qui? La petite Esther, bien sûr. « Je suis désolée, je ne peux pas contrôler tes rêves. » fit-elle, sarcastique au possible. Déclarer ses pêchés? Hum... non. Parce que si elle devait déclarer quoi que ce soit, eh bien, Dieu avait pas mal de compte à rendre, lui aussi. A ce petit jeu-là, elle était certaine de gagner. Mais comme dit précédemment, il n'y avait pas de force supérieure au dessus de leurs têtes, donc, pas de soucis à se faire. « Je vois difficilement qui pourrait m'écouter si tel était le cas. » Oui, parce que si le but dans le fait de déclarer ses pêchés était d'obtenir le pardon du seigneur afin de ne pas passer à côté du paradis et que l'autre connard n'écoutait pas au bon moment, elle dirait tout ça pour rien. Et ça serait vachement inutile, de se mettre à prier pour éviter l'éternité en enfer. Honnêtement, l'enfer, ça la branchait bien. Ouais, voilà. Donc, non, elle ne comptait pas se faire pardonner de ses pêchés.

Mes rêves. Non, mais, je ne rêvais pas de la demoiselle, croyez moi. Fallait pas se prendre pour meilleur qu’on est. J’étais même un peu embêtée de la voir se soir, préférant être seule qu’en sa compagnie. Et puis, bon, je savais bien que la demoiselle était sarcastique. Elle n’était à peine capable de dire une phrase sans ajouté un minime d’ironie. Ça en venait presque agaçant. « Je vois difficilement qui pourrait m'écouter si tel était le cas. » Pourquoi ? Parce que Dieu ne tolèrerait pas toutes ses confessions ? J’imagine qu’elle doit en avoir une tonne de péchés. Mais bon, en même temps, tout le monde en avait, moi y comprit. « Moi je pourrais t’écouter. » dis-je simplement, me disant que cela pourrait peut-être tourner à en quelques sortes une discussion sur ses confessions. J’en apprendrais plus sur elle. Je déposai ma tête sur l’épaule de la jeune femme, regardant l’énorme croix qui était devant nous. C’était un contact physique anodin qui j’espérais n’allait pas lui déplaire. Je ne l’imaginais pas trop dans le genre, on est super copine et on se prend la main pour le plaisir de le montrer. Mais je n’étais plus vraiment gênée avec elle, je ne me retenais plus de faire ce qui me tentait, qu’elle aime ou non. Et puis, la seule autre fille avec qui je pouvais faire ça n’était plus là maintenant. J’avais besoin d’un peu d’affection. J’allais finir par croire que j’étais une dépendante affective. « J’imagine que tu ne crois pas en Dieu et tout ce tralala... » dis-je, plus comme une affirmation, qu’un réel questionnement.

Rapporter ses pêchés. Elle n'en voyait pas l'intérêt. Elle ne se sentait aucunement coupable des choses qu'elle avait faites dans sa vie. Elle n'avait aucune notion de culpabilité ou de regret. Le passé était le passé et elle ne reviendrait pas sur toutes ces choses faites. Ce qui était fait était fait. Si bien que non, elle n'allait pas commencer à confier à Esther à quel point sa vie la conduirait tout droit aux enfers. « Je ne pense pas. » fût tout ce qu'elle dit, de son habituelle voix froide et lasse. Ce n'était pas qu'elle sous-estimait la capacité d'écoute d'Esther, juste qu'elle n'avait pas la moindre envie de parler de sa vie. C'est tout. Et ce n'était pas une décision très étonnante, elle était toujours ainsi. La poupée pensa alors bon de poser sa tête sur l'épaule de Síomha. Soit. Elle n'en dit rien, ne bougea pas pour autant. Elle s'en fichait. Elle affirma alors que la blonde ne croyait pas en Dieu. Elle le supposait. Mais vous connaissez Síomha: elle eut le besoin de la contredire. « A vrai dire, j'y ai cru pendant un temps. » Et puis, elle avait réalisé que ce n'était des conneries. Il n'y avait personne, là-haut pour aider à trouver son chemin, personne à qui demander de l'aide. C'était chacun sa merde pour passer à travers de la vie et en ressortir le moins endommagé possible. Sur ce point-là, Síomha n'avait pas vraiment assuré. Cela dit, elle le vivait bien. Du mieux qu'elle le pouvait. Ce n'est pas comme si quoi que ce soit pouvait changer, de toute façon.

« Je ne pense pas. » Je n’était pas vraiment étonnée de cette réponse. Il n’y avait rien à faire. Je ne pourrai jamais rien soutirer de cette fille. La curiosité que j’avais pour elle était grande, mais elle commençait tout de même à avoir ses limites. Si on ne peut avoir de conversation avec elle, à un moment, on se lasse. Je gardai tout de même ma tête sur son épaules, déposant ma main contre sa cuisse, geste qui était peut-être inutile mais qui montrait que j’étais là si un jour, elle se décidait à parler. Lorsque j’affirmai qu’elle ne devait pas croire en Dieu, elle me dit qu’au contraire, elle y avait déjà cru. Me voilà tout de même assez surprise. Non pas que je remettais sa parole en doute, mais simplement que j’avais de la difficulté à l’imaginer entrain de faire sa prière quotidienne. Encore une fois, c’était un jugement facile de ma par et je ne devais me laisser aller dans les stéréotypes que la jeune femme pouvait représenter. « Et puis, tu t’es rendu compte que c’était du gros n’importe quoi ? T’as bien fait. Je n’y crois pas non plus. Je crois qu’on a pas besoin de Dieu pour avancer dans la vie. On fait se qu’on peut pour vivre ou survivre. » Esther la philosophe ? Non pas vraiment. Je prenais simplement des expériences personnelles pour baser mes propos. Si Dieu m’avait réellement supporté, je n’aurais pas eu à traverser autant de chose. C’est pourquoi je n’y croyais pas.

N'avait-elle donc pas compris? Même avec le temps, elle n'obtiendrait ni conversation de la part de Síomha, ni information sur sa vie. Elle n'obtiendrait rien du tout, si ce n'est la déception de ne pas la connaître. Parce qu'elle ne connaitrait rien d'elle. Pas même son âge. Rien du tout. Rien. Alors, elle pouvait passer son chemin. La blonde ne serait pas une amie pour sa camarade, pas un soutien. Elle n'était rien. Et il faudrait qu'elle le comprenne. Quant à cette histoire de croyance, c'était vrai, il y avait un temps, un temps très très court, cela dit, où elle y avait cru. Où elle avait eu envie d'y croire, du moins. Puisqu'elle n'était pas naïve à ce point-là. Au point de croire sincèrement qu'il y avait une force supérieure, là-haut, qui allait s'occuper de la remettre sur le bon chemin. Non, sa vie s'était juste déroulée comme elle avait dû se dérouler, c'est tout. Et personne n'avait été là pour aider d'une quelconque manière. Non, s'il y avait une chose qu'elle savait, c'était bien qu'il n'y avait pas plus égoïste que l'être humain. « J'ai toujours su c'était du n'importe quoi. C'était juste agréable d'avoir quelqu'un à blâmer, quelqu'un contre qui m'énerver. » Oui, quelqu'un contre qui s'énerver. Elle en avait eu besoin, tellement besoin. Elle avait eu besoin de se révolter, de crier, de se battre, de montrer sa colère... Et puis, ça lui était tout simplement passé.

« J'ai toujours su c'était du n'importe quoi. C'était juste agréable d'avoir quelqu'un à blâmer, quelqu'un contre qui m'énerver. »Je ne pouvais la contredire sur cette affirmation. « T’as raison. » Cependant, cela ne m’était pas vraiment arrivée. J’avais bien assez de personnes dans ma vie qui m’ont déçu dans le passé pour les blâmer et m’énerver grandement contre eux. Non pas que je remets la faute sur tout ce qui c’est passé sur quelqu’un, mais plusieurs événements non carrément pas été de mon ressort. « Mais c’est beaucoup plus facile de blâmer les personnes dans notre entourage que de mettre la faute sur Dieu, moi je trouve. » ajoutais-je finalement, relevant la tête pour regarder la demoiselle à mes côtés. Elle était vraiment jolie. Dommage qu’elle se ferme à tout le monde. Je ne savais plus comment me comporter en sa présence. Je n’attends plus rien d’elle et je sais qu’elle n’attends absolument rien de moi. Le pire, c’est que je lui avais de nombreuses fois laissé la porte ouverte. Je lui avais laissé sa chance, au contraire de certaines personnes ici. « Je sais que tu ne veux pas parler de toi, mais... Je veux simplement savoir, est-ce que t’es mannequin ? » C’était une question impertinente qui ne m’apporterait rien. Mais je saurais peut-être quelque chose de plus. Et puis, elle avait clairement le physique pour l’être.

Spoiler:

T'inquiète.


Síomha ne s'était pas contentée de blâmer Dieu pour ce qu'elle avait vécu et vivait toujours. Non, loin de là. Elle avait blâmé énormément de personnes. Il y avait un temps où elle avait été en colère après le monde entier. Mais encore une fois, ça lui était juste passé. La colère s'était dissipée pour laisser cette impression de vide. Selon Esther, il était plus simple de blâmer les personnes de son entourage. C'est vrai. Mais vous vous doutez bien que la blonde n'était pas la plus entourée des personnes et que dans sa période de colère, c'était son entourage et le reste du monde qu'elle avait dû blâmer. « J'ai blâmé beaucoup de gens. Pas seulement Dieu. » fit-elle sans trop savoir pourquoi elle lui disait une telle chose. C'est vrai qu'elle commençait vraiment à trop parler sur sa petite personne, ça ne lui plaisait pas du tout. Elle décida donc de garder le silence. Sage décision, Esther en savait déjà trop, sans réellement savoir quoi que ce soit. Un ange passa. Et la belle sortit alors une énormité. Elle, mannequin? Elle ne savait même pas si un tel métier lui plairait. « Bien sûr que non. » assura-t-elle en tournant le regard deux secondes vers elle. Pour elle, ça lui semblait évident qu'elle n'était pas mannequin. Pas parce qu'elle se trouvait pas jolie ou quoi que ce soit, ça lui paraissait juste évident à deviner. Mais une autre chose était bien moins facile à comprendre, c'était pourquoi Esther voulait tant connaître la blonde. Là, elle devait avouer qu'elle ne comprenait pas comment qui que ce soit peut s'acharner après s'être faite renvoyer balader tant de fois. « Pourquoi tu veux en savoir autant sur moi, de toute façon? » qu'elle lui demanda alors de sa voix habituellement lisse. Qu'elle en profite, c'était sûrement la première et la dernière fois qu'elle posait une question dont la réponse l'intéressait quelque peu.

Siomha lui confia qu’elle avait blâmer beaucoup de personnes, et pas seulement Dieu. Venait-elle de me faire une confession à son dépend ? Je ne saurais réellement le dire. Cela ne voulait pas dire grand chose, après tout. J’ai blâmé beaucoup de gens dans ma vie aussi, ça ne fait pas de moi quelqu’un de semblable à la blonde. Je lui posai ensuite la question idiote à savoir si elle était mannequin. « Bien sûr que non. » Comme si c’était d’une évidence flagrante. Bah quoi, je trouvais que ça pourrait porter à confusion. Elle a tout le physique pour l’être. « Tu devrais. T’es vraiment jolie. » dis-je en la regardant, accompagnant mes paroles d’un sourire léger, mais bien timide. C’est alors qu’elle me posa une question auquel je ne savais quoi répondre. « Pourquoi tu veux en savoir autant sur moi, de toute façon? » Je la fixai un moment, cherchant surtout les bons mots. « Il n’y a pas vraiment de raison valable. J’aime connaître les gens. Tu m’as intriguée dès la première fois. C’est surement étrange à dire, mais je t’apprécie tout de même un peu... » Et c’était la vérité. J’appréciais la jeune femme dans un certain sens. Je regrettais seulement qu’elle soit autant distante avec moi. Je ne pourrais pas la changer, j’en avais bien peur. « C’est si surprenant que quelqu’un s’intéresse à toi ? » demandais-je en levant un sourcil, intéressée par ce qu’elle allait me répondre.

Magnifique. Une carrière de mannequin pourrait donc l'attendre à la sortie de ce jeu. Fa-bu-leux. Ouais, non, elle ne comptait pas l'être. Même si d'après Esther, elle était « vraiment jolie ». Elle supposait qu'il ne suffisait pas d'être jolie pour être mannequin. Il fallait sans doute être suffisamment expressif. Et clairement, la blonde ne l'était pas. Qu'importe. Síomha avait alors interrogé sa camarade, sur une chose qui la rendait relativement curieuse. Pourquoi, mais Dieu pourquoi voulait-elle absolument savoir des choses sur la blonde? Bien des candidats avaient essayé de lui tirer les vers du nez – quoique, ils n'étaient pas si nombreux – mais Esther, elle, semblait certaine de vouloir en savoir toujours plus. Forcément, elle se demandait pourquoi une telle chose. Sa camarade répondit alors. Le visage impassible, Síomha l'écouta. Elle était intriguée par la blonde? Elle appréciait la blonde? La poupée devait être masochiste ou une connerie du genre. Ouais, ça devait être pour cela. Parce que pour apprécier Síomha, c'est qu'il faut être dingue. Celle-ci ne fit d'ailleurs que lever les yeux au ciel. Puis, Esther continua, lui posant une question à son tour. Si c'était étonnant? Oui, ça l'était. Beaucoup. Personne ne s'intéressait à elle de cette façon et elle ne laissait personne s'intéresser à elle de toute façon. Et c'est bien ce qu'elle aurait pu répondre, mais à la place de ça, elle fit: « A ton avis? » Il suffisait de voir sa popularité dans ce jeu. Visiblement, elle n'intéressait pas grand monde. Et elle n'allait pas s'en plaindre, c'était très bien comme c'était. Mais ça ne changeait pas qu'elle n'avait pas l'habitude que quiconque soit intéressée par sa personne. Et Esther ferait mieux de ne pas l'être non plus.