Nicole

LUNDI 01 OCTOBRE ; 20H41
FÊTE FORAINE ABANDONNÉE

Si il y a bien une personne sur laquelle je ne m'attendais pas à tomber ce soir, dans cette fête foraine et plus précisément près du carrousel, c'est assurément ma partenaire, Nicole. Alors bien sûr, en tombant sur elle je fus d'abord surpris, puis je décidai d'aller à sa rencontre car après tout, j'estimais avoir certaines choses à lui dire. J'avançai donc en sa direction, prenant au passage une grande inspiration avant de l'accoster. « Crois-moi ou non, mais je suis sincèrement désolé pour... le départ de Teresa. » Je n'avais pas oublié que Nicole m'avait pris pour un menteur, la semaine passée, lorsque j'avais eu le malheur d'oser la complimenter et lui signifier qu'à mes yeux elle avait tout d'une femme bien. Je savais qu'à l'avenir, j'allais devoir peser mes paroles et veiller à ne surtout pas trop la flatter. Mais je n'étais pas seulement désolé pour le départ de Teresa, dont je savais ma partenaire très proche. Non, il y avait autre chose qui me préoccupait ce soir. Et en fait cela me faisait culpabiliser depuis plusieurs jours maintenant. Voilà pourquoi j'ajoutai bientôt « Et aussi pour mon comportement dans le champ, la semaine dernière. Je te promets de faire des efforts. » Oui j'étais réellement prêt à en entreprendre car je voulais que nos rapports s'arrangent, et ne désirais aucunement être brouillé avec ma partenaire, moi qui détestais plus que tout me mettre quelqu'un à dos. Alors des efforts, j'allais en faire, il le fallait après tout. Dans l'histoire, celui qui avait gaffé, c'était carrément moi. Aussi, si des efforts devaient être faits d'un côté, c'était principalement du mien. Nicole ne faisait peut-être pas non plus tout ce qui était en son pouvoir pour me mettre à l'aise, mais je pouvais la comprendre, du moins comprendre son ressenti face à tout ça... J'étais agaçant comme partenaire, dans mon genre. Ce ne devait pas être facile pour elle de se dire que nous étions à présent liés l'un à l'autre jusqu'au départ de l'un d'entre nous qui, je l’espérais, n'adviendrait pas de si tôt. Alors ces excuses coulaient de source, à mon sens.

Je devais vraiment être plus que sous les vers de terre pour m’aventurer seule dans une fête foraine abandonnée. Ce n’est pas comme si en pleine nuit il n’y avait rien de plus… FLIPPANT ! Le bad vous fait faire des choses étranges parfois. A vrai dire j’étais là depuis une bonne heure, j’étais donc arrivée alors que le jour se couchait tout juste. De jour ou de nuit c’est pareil, le silence parait suspect et on s’attend) ce qu’un clown hanté vienne nous faire peur d’un moment à un autre pour mieux nous égorger ensuite. Bref, je sais pas ce que je foutais sur ce carrousel à une heure aussi tardive. J’avais un peu bu aussi. Je ne suis pas alcoolique, non non, mais j’avais trinqué l’apéro avant de partir seule comme une voleuse. En souvenir de Térésa, toujours, je m’étais assise sur l’un des vieux cheval du manège en me remémorant les bon moments qu’on avait pu passer ici avec la grosse ; lorsqu’on était encore pures et innocentes sous l’autorité des vieux. Ca me faisait doucement sourire. L’alcool me faisait planer, sans ça j’aurais déjà éclaté en sanglots. Je me trouvais pathétique à faire ressortir toutes mes larmes précieusement gardées pendant des années face à des caméras voyeuristes. Pas ma faute si elles me lovent mais bon, shitass hm. « Crois-moi ou non, mais je suis sincèrement désolé pour... le départ de Teresa. » J’hurlais. Genre gros AAAAAAAAAAAAAH qui déglingue les tympans. A peine j’avais ouvert la bouche que l’identification de l’interlocuteur s’était faite, mais je me devais d’hurler. C’est comme ça dans tous les films d’épouvaaaaaAAAaaaAAAaante. Bref, les vapeurs alcoolisées m’incitaient à continuer mon cri de gazelle en rut tout en regardant le petit frisé dans les yeux. Fermage de clapet toute ! Je me taisais. Faire des efforts ? Lolilol ? Il avait décidé d’acheter du viagra ? Bieeeeeen. On allait se marrer cette semaine à jouer au cow-boy contre indien ! Je me balançais légèrement sur mon cheval, comme si le vent me poussait, mes pieds battant à tour de rôle le pauvre animal inanimé en regardant droit devant moi. M’apprêtant à parler à mon fake lover boy, je reportais mon attention sur lui. « Ne te force pas Kilam… ça ne sert à rien de forcer le passage. C’est évident que même avec de la glue Pattex on est pas fait pour coller ensemble… » Kilam c’est son prénom en verlant. J’ai pensé à ça l’autre jour, en enroulant mes doigts dans ses bouclettes tandis qu’il dormait. Il avait beau être hésitant et vieux type, il était attachant ce petit Malik. Lorsqu’il dormait, quoi. Je me m’affalais sur la tête de l’étalon, ma joue posée contre le métal froid. « C’est dommage... ça m'attriste un peu de constater que tu n'es pas heureux d'être en couple avec moi. Je veux dire je peux comprendre si t'es plus ceinture virginale que capotes vibrantes, mais laisse moi au moins te toucher dans d'autres situation que dans ton sommeil. » Wait. Pause. Je suis partie trop loin là? J'ai bu combien de verres déjà? J'espère simplement que l'intonation de ma voix ou le comportement de mes pupilles ne me trahi pas. La honte sinon. Je me redressais, levant les mains comme s'il allait m'arrêter « Juste les bouclettes gauches! » J'hésitais maintenant entre descendre ou lui proposer de monter avec moi. A voir s'il allait être opé. Étrangement une petite voix intérieure me donnait déjà la réponse. Baissant les mains, je tapotais maintenant le cheval. Tout douuux. « Tu veux monter? »

Nicole avait très certainement un petit coup dans le nez ce soir. Il fallait voir aussi comment elle avait réagit lorsque je l'avais accostée, près de ce carrousel. Un cri fracassant, assourdissant, abrutissant même, voilà ce à quoi j'eus droit alors. Par miracle, j'en préservais la totale fonction de mon ouïe. Suite à quoi je m'excusai pour le départ de Teresa, et lui signifiai vouloir faire des efforts, pour le bien de notre 'couple'. « Ne te force pas Kilam… ça ne sert à rien de forcer le passage. C’est évident que même avec de la glue Pattex on est pas fait pour coller ensemble… » Alors déjà, première nouvelle, moi qui jusqu'ici portais le prénom Malik me voyais désormais rebaptisé Kilam. Bah, ça m'allait tout aussi bien non ? Hm, pas sûr néanmoins que ma mère apprécie beaucoup. Selon Nicole nous n'étions vraiment pas faits pour être ensemble. Sans doute regrettait-elle le fait que la production nous ait mis en couple au début de l'aventure - moi je ne regrettais rien, sincèrement, et désirais plus que tout que les choses aillent en s'arrangeant par la suite bien que c'était vraiment loin d'être gagné. « C’est dommage... ça m'attriste un peu de constater que tu n'es pas heureux d'être en couple avec moi. Je veux dire je peux comprendre si t'es plus ceinture virginale que capotes vibrantes, mais laisse moi au moins te toucher dans d'autres situation que dans ton sommeil. » Je marquai un temps d'arrêt, ne sachant pas ce qui me surprenait le plus dans ses propos : la référence à la ceinture vaginale et aux capotes vibrantes, ou le fait que j'apprenais tout juste que lorsque je dormais, Nicole se permettait quelques folies sans que je ne m'aperçoive de rien. J'avais le sommeil lourd, ce devait être pour ça. « Et moi ce qui m'attriste, c'est le fait que mon comportement vis-à-vis de toi t'ait laissé penser que je n'étais pas heureux d'être ton partenaire. Ce n'est pas du tout le cas. J'aimerais tellement te le prouver. » Oui mais... comment ? Entreprendre des efforts, j'étais prêt à le faire, mais je ne savais vraiment pas comment agir avec Nicole. Un faux pas était si vite arrivé, comprenez-moi. « Juste les bouclettes gauches! » J'esquissais un fin sourire, un peu crispé celui-ci, et trahissant mon ressenti du moment, une immense frustration. Mes cheveux étaient vraiment le cadet de mes soucis désormais - je voulais à tout prix remonter dans l'estime de ma partenaire mais franchement, j'accumulais les erreurs depuis mon entrée dans ce jeu. « Tu veux monter? » Si un tour de carrousel me tentait ? Enfin, un tour... les chevaux de bois ne bougeaient pas, après j'avais suffisamment d'imagination pour faire comme si c'était le cas. Et puis j'étais resté un grand enfant surtout. "Fais un effort Malik, fais un effort !" ne cessais-je de me répéter intérieurement, tandis que je plaçai un pied devant l'autre, grimpant sur le manège. « Tu me fais une petite place ? » Nicole et moi n'étions pas bien épais alors, à priori il devait y avoir de la place pour deux sur ce cheval de bois. Une fois la jeune femme légèrement avancée, je m'asseyais derrière elle. Et, contre toute attente, je plaçai bientôt mes mains de part et d'autre de sa taille. Si ça n'était pas un effort considérable, qu'est ce que c'était, je vous le demande. « Hum. Dis-moi Nicole, si tu avais eu le choix, tu aurais choisi un autre partenaire ? » lui demandais-je ensuite, toujours agrippé à sa taille. Nous aurions pu aborder un tout autre sujet seulement je n'arrivais pas à me défaire de cette histoire.

Strange world. Very very strange world. Ou devrais-je dire strange Kilam. Jamais un homme ne m’avait parlé avec autant d’attention et de sincérité sans avoir des projets sexuels pour la suite de notre conversation. Je n’arrive pas à faire confiance aux gens, mais en ce moment même j’osais croire en ses paroles, en sa sincérité qui semblait naïve tellement elle paraissait être forte. Peut-être que l’alcool m’aidait à me montrer empathique, pour une fois, et j’acceptais donc ses dires ; me retenant de le traiter une seconde fois de menteur. Lorsque nous étions dans les champs c’était visiblement ce qui avait donné lieu à un malaise, je m’engageais donc à me montrer sympathique et à ne pas recommencer… pour cette fois. J’avais envie de m’éterniser sur les mots qu’il venait de prononcer, c’est comme s’ils m’avaient…sonnée. En ce temps de baisse de morale et d’hypersensibilité, j’étais touchée par ces gentilles paroles qui me réconfortaient indirectement. Malgré tout je me doutais bien qu’il n’était pas du genre à être tout à coup l’homme idéal à mes yeux, même s’il allait entreprendre de me le « prouver ». Je sais déjà que pour lui me passer le sel en me touchant la main relevait de l’effort… fallait pas que je m’attende à quelque chose de super élaboré. D’ailleurs je craignais de l’avoir traumatisé avec mes sous-entendus de touche-pipi. Je levais ainsi les mains telle une hors la loi, en précisant que je n’avais touché que ses bouclettes gauches pendant son sommeil. Les droites étant inaccessibles. Contre toute attente il accepta ma proposition, montant avec moi sur le cheval de bois. Je souriais, ravie de sa décision. J’aurais moins la pétoche toute seule sur l’étalon déglingué. Je le regardais se glisser derrière moi tandis que je m’étais avancée afin de lui faire un peu de place, mes mains posées sur la tête de l’animal. Je l’aurais bien aidé à monter mais c’est à peine si j’osais le toucher, de peur qu’il parte en courant. Et j’ai pas envie de me retrouver toute seule parmi les clowns hantés moi. Prête à ouvrir mon clapet, je me tus finalement. La tête discrètement baissée, mes pupilles fixaient les mains qui venaient se poser sur ma taille. Quelle énooooorme surprise. J’étais in shock with electric shock là. Really. L’envie de poser mes mains sur les siennes et de m’appuyer contre lui me chatouillait dangereusement, mais j’avais tellement peur de l’effrayer que je m’abstins. Avec lui c’était comme si j’étais un monstre indélicat et vulgaire. Mes doigts venaient exercer de petites pressions sur ses mains, comme pour tâter si oui ou non elles étaient réelles. Fort est de constater qu’elles le sont. « Hum. Dis-moi Nicole, si tu avais eu le choix, tu aurais choisi un autre partenaire ? » Ah, je me doutais bien qu’il était mal à l’aise. Son « hm » de début voulait tout dire. Mon cerveau se mit à réfléchir… dans tous les cas lui dire que « oui bien sûr, tu t’attendais pas à l’inverse j’espère ? » était fortement déplacé, et qui plus est… depuis trois jours (ou deux ?) je ne voyais plus les choses de la même manière. « La plupart des gens ici sont aigris, blasés et tatoués… alors non. Toi au moins tu as l’air normal… et tu fais pas partie de la mafia. Je n’ai jamais fréquenté de gens qui rentraient dans la norme, en fait, et du coup tu m’intrigues. Même si t’es pas de la mafia. » Je me retournais autant que je pouvais afin d’apercevoir un petit bout de sa tête et de constater qu’on était vraiment proches. En Corée le culte de la beauté est à la peau blanche et immaculée, les tatoués étant ceux des quartiers dangereux, ou de mauvaises familles ; les voyous en somme. Du coup je n’en étais pas très fan, et Malik –God save the Queen- ne possédait pas l’une de ces cicatrices colorées immonde signe d’appartenance à des gangs mafieux. Certes les mœurs ont évolués mais on m’a élevée avec cette signification, donc pour moi les tatous c’est le maaaaaal. Je pose finalement mes mains sur les siennes, venant carrément les saisir. Je me sentais protégée comme ça. Protégée des attractions flippantes et désertes qui se trouvaient dans mon champ de vision. Je le sentais, un petit oiseau allait sortir ! Mais genre pas un pivert, un truc flippant ! On était un peu en séquence émotion là… c’était donc le moment de lui poser la question qui me tenait à cœur. « Je te fais peur, sincèrement ? Autant parfois je me dis que c’est parce que tu n’as pas confiance en toi que nos conversation sont maladroites, mais j’ai plus l’impression que c’est parce que je suis trop entreprenante et que ça te gène… tu sais, c’est pas volontaire, c’est un peu… l’habitude.» J’espérais qu’il allait me comprendre. Ne pas pouvoir dire les choses en entier, c’est complètement frustrant. Mais ça l’est moins que le fait de limite m’excuser. Nos conversations me donnaient l’impression de tourner en rond, je nous comparerais même à deux aimants qui se rejettent mais qui persistent à essayer de se coller entre eux. Malik m’apparaissait comme un être blessé, quelqu’un qui s’est instauré une barrière qu’il ne cherche même plus à franchir. Balançant ma tête d’un côté et de l’autre, je me mis à fredonner un petit air qui aurait parfaitement pu passer dans la bande son à l’époque où le carrousel fonctionnait encore ; comme si nous nous exercions à un petit rictus amoureux. Hésitant, je me décidais finalement à m'adosser contre lui, comme si nous étions... "amoureux"; bien que je redoutais qu'il ne cesse de respirer par panique.

Paaaaaavé, mes excuses.

Nicole semblait penser que je n'étais pas heureux de m'être retrouvé avec elle pour partenaire. Or je lui fis comprendre que ça n'était pas du tout le cas, que peut-être ma façon de me comporter avec elle le faisait penser, mais qu'à l'intérieur ce que je ressentais était plutôt tout l'inverse. Mais elle alors, si la décision lui était revenue, aurait-elle porté son choix sur un autre partenaire ? En d'autres termes, aurait-elle aimé être liée à un tout autre candidat ?... « La plupart des gens ici sont aigris, blasés et tatoués… alors non. Toi au moins tu as l’air normal… et tu fais pas partie de la mafia. Je n’ai jamais fréquenté de gens qui rentraient dans la norme, en fait, et du coup tu m’intrigues. Même si t’es pas de la mafia. » Ah non, ça c'était une certitude. Et la mafia n'aurait jamais voulu d'un type comme moi. À la limite, être leur cible et finir avec une balle entre les deux yeux, ouais pourquoi pas, mais travailler pour eux... Néanmoins je lui donnais raison sur un point : bon nombre de candidats cette saison arboraient des tatouages, parfois même sur tout le corps. Et ça n'était pas une chose que je voyais d'un très bon œil tout à fait honnêtement. « C'est clair que ce n'est pas sur moi que tu trouveras le moindre tatouage, ou le moindre piercing. » Je n'étais vraiment pas fan de ces petites choses. Aussi, je me souciais quelque peu de l'image que je pouvais véhiculer. Si les gens me prenaient pour un arriéré sans même me connaitre et en un simple regard, à quoi leur aurais-je fait penser avec un piercing au nez et des tatouages sur les bras... D'ailleurs, je me rendais compte que malgré le fait que Nicole était fréquemment légèrement vêtue, elle non plus ne donnait pas dans ces petites extravagances. Les personnes donnant dans ce genre-là devaient avoir le besoin d'attirer l'attention sur eux, un besoin que je n'avais pas. Toujours assis derrière elle et agrippé à sa taille, ses mains se posèrent bientôt sur les miennes. Drôle de contact dont j'essayais de m’accommoder, malgré tout. « Je te fais peur, sincèrement ? Autant parfois je me dis que c’est parce que tu n’as pas confiance en toi que nos conversation sont maladroites, mais j’ai plus l’impression que c’est parce que je suis trop entreprenante et que ça te gène… tu sais, c’est pas volontaire, c’est un peu… l’habitude.» Elle n'était pas la seule fautive dans l'histoire. Elle n'agissait peut-être pas de la meilleure façon vis-à-vis de ma personnalité et de ma façon d'être, mais ça n'était pas à elle de s'adapter à la personne que j'étais. « À vrai dire tu as raison sur les deux points : je manque sans doute de confiance en moi, de façon générale, et... tu es aussi un peu trop entreprenante à mon goût. Et oui, même si j'essaye de faire avec, ça me gêne. Vraiment beaucoup. » C'était maintenant avoué, mais je redoutais la façon dont elle allait le prendre, tout à fait honnêtement. Je ne pensais vraiment pas à mal. Non, pas un instant. « Mais ne le prends pas comme une critique, dis-toi juste que pour moi, ça n'est pas facile, parce que je manque d'expérience, et parce que la vie m'a joué des tours me poussant maintenant à être méfiant, voir même à fuir certaines situations... » Quand j'étais amené à faire la rencontre d'une jolie jeune femme dans un bar, le soir, et qu'elle devenait de plus en plus pressante, je préférais fuir, redoutant ce qui pourrait advenir ensuite, même si je connaissais déjà, même si j'avais déjà découvert ce qu'il y avait à découvrir, à un certain moment de sa vie. Nicole se laissa finalement doucement tomber en arrière, jusqu'à s'adosser contre moi. Je n'étais là encore pas très à l'aise, mais après ce petit déballage, j'avais quand même le cœur un peu plus léger. Aussi, sans que je comprenne pourquoi, l'une de mes mains vint se perdre dans ses cheveux. Il fallait croire que je prenais peu à peu mes aises.

Malik n’avait donc aucun tatouage ni piercing et d’un côté ça me rassurait. Il n’était pas de ces types qu’on ne soupçonne de rien et qui ont finalement un petit anneau accroché au bout du bijou ; you know what I mean. Ce que je trouve d’ailleurs totalement space, il n’y a que les dingos pour faire une chose pareille.« À vrai dire tu as raison sur les deux points : je manque sans doute de confiance en moi, de façon générale, et... tu es aussi un peu trop entreprenante à mon goût. Et oui, même si j'essaye de faire avec, ça me gêne. Vraiment beaucoup. » Alors là, je ne savais que retenir de cette phrase, le fait d'avoir raison ou que de le mette mal à l’aise ? Positif ou négatif ? Bon je m’en fou de toute façon, du moins c’est ce que j’essaie de me dire pour ne pas me vexer, sauf que ça ne marche pas. Je m’en doutais, pour ne pas dire que je le savais, mais étrangement l’entendre de sa bouche donnait une toute autre consonance au sujet. C’est fou comme certaines choses peuvent s’ancrer en un être alors qu’au début ce n’était qu’une formalité… et là, je réalise que je me remets en question. Pourquoi ? Je ne comprends pas. Je n’ai pas à me questionner sur moi-même, je suis parfaite, alors pourquoi m’interroger si je sais ce que je suis et qui je suis ? Si Térésa était là ça n’arriverait pas. J’ai peur de devenir n’importe qui sans elle, du genre vieille fille moche qui n’a pas confiance en sa personne. Le genre de nanas qui font office de nos moqueries, en somme. Je crois qu'en fait ce qui m’avait gênée dans la phrase de Kilam était le « même si j’essaye de faire avec ça me gêne », ça me donnait l’impression d’être un poids, une corvée pour lui. Je l’imaginais se cacher pour éviter de me croiser, moi et mon encombrance (faut que je dépose un copyright sur ce mot en sortant du jeu). Bien qu’il me disait maintenant de ne pas me sentir critiquée, ça n’arrangeait rien. Je n’avais rien à lui répondre alors je me contentais d’écouter les mots qu’il avait à me dire avec sérieux. Bien que son intention première fût de se justifier, j’y voyais plus l’opportunité d’en apprendre un peu plus sur lui. Il venait ainsi de me confesser qu’il avait eu quelques obstacles dans sa vie; j'en conclus donc à une relation difficile. J’aurais aimé le questionner sur ce sujet mais apparemment pour les gens sensibles c’est difficile de reparler d’échecs dans le genre. Ne sachant que faire, je fredonnais donc un petit air adossée contre lui. Les paupières closes, je pouvais me revoir avec Teresy pouffy lors de notre dernier séjour en fête foraine, où on a fini par se faire virer du manège. A-t-il fini par craquer ? Malik enlevant l’une de ses mains de ma taille, j’en déduisis qu’il avait atteint sa limite de proximité pour la journée, sauf que non. Je ressentais le contact de cette même main au niveau de ma tête. Ouf. Je suis toujours aussi parfaite. Ma petite remise en cause de tout à l’heure était donc inutile, je ne lui faisais pas peur en fait. Great. C’est chiant de douter. Mes yeux se rouvrirent. S’il se sentait à l’aise alors c’était le moment pour creuser. Je n’y peux rien, il a titillé ma curiosité. « Je vais essayer de faire en sorte que tu les affrontent alors, ces situations. » WAAAAAAOUW ! Je sors des phrases dignes des feuilletons de l’après-midi pour ménagères désillusionnées là ! C’est limite si je ne me prends pas pour une héroïne canonissime qui vit une histoire d’amour exaltante. Alors que trop pas. Le but était finalement de lui dire que j'allais essayer de l'aider à évoluer, comme un maître dresseur entraine un pokémon. Il n'allait pas rester frustré sur un bad toute sa vie après tout. Admirant toujours un peu plus le décor lugubre et flippant qui s’offrait à moi, je réalisais que je n’avais toujours pas posé ma fichue question. J’espérais seulement qu’il n’allait pas se fermer sec. « De quel genre de tours il s’agit ? » Mon intonation de voix s’était faite attendrissante et douce afin qu’il se décide à se livrer. Le regard par-dessus mon épaule, je pivotais finalement ma tête de quelques degrés afin de voir les traits de son visage traduire sa réaction de près. De très près, même. Je n'avais jamais eu l'occasion de l'admirer d'aussi près. Admirer parce qu'il a une face très intrigante et peu commune. Un peu comme une poupée en cire. Je ne sais pas pourquoi mais j’avais envie d’entendre cette histoire, le pourquoi de son mal-être ; ce qui avait pu le traumatiser à ce point. Ca m'aiderait à le cerner.

Chez moi donc, ni tatouage, ni piercing, ni quelque autre extravagance. Et sauf sous la torture, je ne me laisserais jamais tenter par de telles fantaisies. Mais cela n'avait pas grande importance, en comparaison avec le fait que je venais d'avouer à Nicole qu'elle était trop entreprenante avec moi, et que cela me gênait. Bien que j’espérais qu'elle ne le prendrait pas pour elle, en tout cas pas mal, son silence après ça n'était pas très rassurant. Elle n'était pas fâchée tout de même ? Je n'en savais rien, je ne voulais pas qu'elle m'en veuille, non vraiment je ne voulais pas, car pour la première fois, je lui avais réellement parlé franchement et sans me dissimuler derrière une carapace. Certains mots devaient être dits ce soir, c'était le moment, et Nicole l'avait saisi elle aussi. J'évoquai alors certaines expériences vécues qui me poussaient aujourd'hui à fuir certaines situations, et à me renfermer, parfois, sur moi-même. « Je vais essayer de faire en sorte que tu les affrontent alors, ces situations. » Combattre le mal par le mal, c'était ça le plan ? Allez savoir à quoi j'allais avoir prochainement droit avec Nicole. Si elle souhaitait m'aider, je m'en réjouissais. J’espérais juste qu'elle ne me traumatiserait pas non plus. Oh non, je préférais croire que cette démarche était sincère et que tout ceci ne pourrait me faire que du bien par la suite. « De quel genre de tours il s’agit ? » Très vite, je sentis son regard se poser sur moi avec une certaine insistance. Elle semblait vouloir en savoir plus, et je pouvais le comprendre. Et puis si en parler pouvait m'aider à exorciser mes vieux démons et, enfin, aller de l'avant, alors j'acceptais volontiers de me confier. De toute façon j'étais un peu piégé là. Si je refusais de le lui en parler, les efforts que je lui avais promis ne seraient pas fait, alors non, il me fallait prendre mon courage à deux mains et ressasser le passé. « Le genre de tours qui te laissent dans un sale état pendant un moment. Le genre de tours qui te brisent un cœur. » soufflais-je d'une voix se faisant de plus en plus basse à mesure que ces mots furent prononcés. Bon bon, là encore ça n'avait rien de très explicite bien que le principal venait d'être dit. Je supposais donc qu'il me faudrait la raconter, l'histoire. Lui faire part de ce que j'avais vécu, de ce qui avait fait de moi cet être blessé qui renonçait à beaucoup de choses par crainte de revivre ce qui l'avait laissé, il y a quelques années, dans un sombre état de déprime. « Quand j'avais dix-sept ans, je suis tombé sous le charme de ma voisine, Lahoussine. Elle avait huit ans de plus mais la différence d'âge ne nous dérangeait pas sur le moment. J'étais sincèrement amoureux d'elle, et je lui dois beaucoup. Elle m'a fait découvrir ce qu'une jeune femme "d'expérience" peut faire découvrir à un jeunot ignorant. Je suppose que je n'ai pas besoin de te faire un dessin. On était bien ensemble, ça a duré plusieurs mois dans le plus grand secret. Mais alors que je croyais en cette histoire, Lahoussine y a mis fin du jour au lendemain et s'est énamourée d'un type plus mûr, et surtout plus riche. J'ai eu beaucoup de mal à m'en remettre. Ça m'a foudroyé, détruit, anéanti. Pour m'abandonner comme ça, je suppose qu'elle ne m'aimait pas réellement. Du coup je me demande encore ce qu'elle cherchait chez un type comme moi. Des mois, c'est long, faut croire que j'étais doué au... bref. » Oui oui, bref. Peut-être pensait-elle qu'au vu de la situation, j'en faisais trop. Peut-être aussi se disait-elle que tout ceci n'avait rien de franchement dramatique, et que je m'apitoyais un peu trop sur mon sort. Et pourtant, cette histoire avait déterminé l'homme que j'étais devenu. Maintenant je fuyais les femmes, non, je me remettais carrément en question. Mes préférences notamment, je n'étais plus sûr de rien. « Tu dois te dire que c'est ridicule, qu'une amourette d'adolescent ne peut pas m'a rendu comme tel,... et pourtant, c'est le cas. Mes illusions ce jour-là ont été brisées, mon cœur également. Et aujourd'hui je crains de revivre la même chose, voilà pourquoi je me montre si méfiant. » Je venais de me rappeler pourquoi mon frère était plus enrobé que moi. J'avais dû fondre à cette époque de ma vie, où m'alimenter était aussi difficile que de sortir de chez moi. Je soupirai longuement. Bon déjà, ça soulageait un peu de raconter toutes ces choses. Seulement je craignais maintenant la réaction de Nicole. Rire, se moquer, compatir, garder le silence... je me demandais bien ce qu'elle allait faire maintenant. Quant à moi, j'avais gardé cette main dans ces cheveux et je la laissai encore errer, tandis que je n'arrivais plus à effacer de mes pensées le visage de Lahoussine. Encore aujourd'hui repenser à tout cela me faisait beaucoup de mal. Je pensais être guéri, avoir surmonté ça, nous le pensions tous dans la famille - mes proches m'ayant littéralement ramassé à la petite cuillère à l'époque -, mais en fait non, je ne m'en étais pas du tout remis et ce malgré les sept années passées depuis. Sept ans durant lesquels je n'avais plus touché une femme, ce qu'un homme normal n'aurait sans doute pas supporté. Quelque chose clochait chez moi, définitivement.

désolée pour la longueur !

Son histoire était longue pour pas grande chose. Il s’est fait largué, ça a brisé sa fierté d’homme et il en est resté traumatisé ; point. Je restais perplexe, mes yeux clignant deux fois d’affilé à la fin de sa tirade. Pour la partie bon au lit je voudrais bien tester par moi-même d’ailleurs. Mais soit, soit ! Je devais prendre des airs de compatissante là sinon la scène allait définitivement mal tourner et Malik se refermerait comme une huitre jusqu’à la fin de l’aventure. Personnellement je ne crois pas en l’amour mais beaucoup s’attèlent à cette idée. Pour moi l’ « amour éternel » c’est simplement lorsqu’on s’habitude à une personne et qu’on rentre dans une routine qu’on a peur de quitter, du coup on s’aveugle intensément pour ne pas voir la vérité. La vérité qui est la dépendance à la personne. Entre autre, l’amour c’est du pipeau ; de la poudre de perlimpinpin qui vous fait croire un instant –ou éternellement, donc- qu’une personne est spécialement taillée pour vous rendre heureux. Je ne le regarde plus. Mon visage est de nouveau tourné vers le cheval en bois d’en face, c’est bien plus pratique pour qu’il ne puisse voir mes expressions. C’est bien simple, je ne sais pas du tout comment réagir. A la base de la base j’aurais ri, signalant qu’il en faisait trois tonnes et que ce genre d’histoire ça arrivait à tout le monde. Mais c’était Malik, il était romantique, naïf et un poil fragile, et bizarrement depuis le début de cette aventure je faisais en sorte de prendre son ressenti en compte ; grande première pour ma personne. Pour preuve, je l’aurais bien enlacé si je n’avais pas su qu’il était psychorigide… au moins maintenant j’en connaissais les raisons. « Le fait d’en parler c’est déjà un pas en avant. Il faut tourner la page et faire ta vie. Je me redressais, pivotant comme je pouvais en direction de mon interlocuteur Tu ne vas pas rester toute ta vie isolé sans goûter aux plaisirs de la chair ? Et de la vie tout court... mais sérieux sept ans c’est long ! Il faut que tu chasses cette mélancolie qui t’empoisonne. Chacun sa vie tu sais, cette fille t’as aimé sauf qu’elle était vénale et a préféré un mec qui pourrait lui payer toutes les fringues hypes qu’elle désire. Chacun ses centres d’intérêt, j’ai envie de dire. Peut-être qu’elle ne croyait pas en l’amour mais qu’elle l’a vécu sans le savoir. » J’avais débité en étant tellement convaincue que je m’étais embarquée dans des phrases de réconfort que je n’aurais jamais soupçonné sortir de ma bouche. Sonnée par mes propres paroles, je marquais une pause. Moi-même je venais d’émettre l’hypothèse qu’on pouvait être amoureux tout en ne croyant pas en cette utopie. Fake Lover était décidément un tourbillon de remise en cause. Étant moi-même seulement intéréssée par l'argent j'étais un peu culottée de lui avoir servit ce discours puisque j'aurais sûrement fait la même chose que cette Laouzi truc. Pour conclure, je lui adressais un sourire amical, me sortant de mes pensées. Je lui aurais bien proposé mon volontariat pour l'aider à retrouver la main en ce qui concernait bisous bisous ++ mais je crois que la situation n'était pas du tout appropriée. Me débattant afin de me placer comme l'aurait fait Sissi sur son cheval blanc, je finissais donc dans une posture certes inconfortable mais au moins je pouvais voir Malikus plus facilement et un autre angle de paysage s'offrait à moi. « C'est un peu glauque ici. Pourquoi tu es venu ici en pleine nuit? Ne me dis pas que tu trouves ça romantique! ... mais d'ailleurs, pourquoi tu t'es présenté à Fake Lover?» Son histoire m'avait fait comprendre les raisons de son comportement, et étrangement je ne cherchais plus le contact avec lui, de peur de lui faire revivre son passé déprimant.

Je lui fis finalement part de mon histoire, l'histoire d'une déception amoureuse traumatisante dont je ne m'étais pas encore remis. Maintenant restait à voir comment Nicole allait réagir face à ça. J'avais quand même un peu peur, et me disais que ce genre d'histoires devaient faire doucement rigoler les jeunes femmes dans son genre. Tout ça pour dire qu'à mes yeux, Nicole n'avait pas l'air d'une jeune femme très portée sur l'amour, les sentiments. Je me demandais même si elle avait été amenée, un jour, à vivre une désillusion amoureuse. Mais contre toute attente, point de rires, point de moqueries, juste de la considération et de la prévenance. « Le fait d’en parler c’est déjà un pas en avant. Il faut tourner la page et faire ta vie. Tu ne vas pas rester toute ta vie isolé sans goûter aux plaisirs de la chair ? Et de la vie tout court... mais sérieux sept ans c’est long ! Il faut que tu chasses cette mélancolie qui t’empoisonne. Chacun sa vie tu sais, cette fille t’as aimé sauf qu’elle était vénale et a préféré un mec qui pourrait lui payer toutes les fringues hypes qu’elle désire. Chacun ses centres d’intérêt, j’ai envie de dire. Peut-être qu’elle ne croyait pas en l’amour mais qu’elle l’a vécu sans le savoir. » Je commençais à ouvrir les yeux sur certaines choses, et c'était grâce à Nicole. Effectivement je prenais enfin conscience du fait que Lahoussine s'était jouée de moi, m'avait pris pour un abruti et n'avait pas hésité à me laisser tomber pour un homme qui pourrait lui offrir ce qu'elle souhaitait, ce dont je n'étais pas capable avec mes faibles moyens. J'avais passées sept années à me morfondre, à privilégier les relations amicales à tout le reste. Avec le temps, je devais même être rouillé sur le plan intime. Je n'étais par ailleurs pas en état de manque. Tout était plus clair désormais, je savais que le mieux à faire maintenant, pour sortir définitivement de cette spirale infernale et trouver le bout du tunnel, c'était faire preuve de volonté. Et la volonté, oh ne vous inquiétez pas, elle était bien là. « Merci Nicole. » fis-je dans un sourire en coin. Elle ne s'en rendait surement pas compte, mais elle venait de m'être d'une très précieuse aide. Elle avait saisi le malaise, mon mal-être également, et s'employait maintenant à faire en sorte que je trouve la force de passer outre tout ça. Rien ne l'obligeait à le faire, et pourtant. Nicole entreprit de passer ses deux jambes d'un côté, afin d'être plus libre dans ses mouvements, et ainsi pouvoir me faire face, ce qui sans doute devait être plus agréable pour elle au vu de la conversation que nous tenions, mais qui ne me rendais pas plus à l'aise moi... « C'est un peu glauque ici. Pourquoi tu es venu ici en pleine nuit? Ne me dis pas que tu trouves ça romantique! ... mais d'ailleurs, pourquoi tu t'es présenté à Fake Lover? » Romantique ? Ah non, pas vraiment. Et en fait, je n'avais plus vraiment la notion de ce qui était romantique, et de ce qui ne l'était pas. Mais une fête foraine abandonnée, non, je ne saisissais pas le romantisme de la chose. Le destin avait fait que je m'étais retrouvé en ce lieu au même moment que ma partenaire. Et je vous jure que je ne l'avais pas suivie ! « Pour ce qui est de cette fête foraine, je errais sans vraiment savoir où j'allais et mes pieds m'ont conduit jusqu'ici. » J'avais également eu l'occasion de visiter celle-ci la semaine passée en compagnie de Tris, la mangeuse de barbes à papa, et tout ceci me ramenait un peu en enfance, ces manèges, ces stands à friandises... c'était peut-être glauque à ses yeux, mais ça ne l'était certainement pas aux miens. Chacun sa vision des choses hein. « Quant à ma venue dans cette émission, cela résulte d'un défi lancé par ma mère, en quelque sorte. Elle me pensait incapable de trouver l'amour à la télévision, j'ai voulu lui prouver le contraire. Seulement elle me voyait plutôt marié à une fille qu'elle aurait elle-même choisie, comme elle l'a fait avec mon frère... je crois qu'elle n'a pas réalisé que je n'étais pas remis de cette histoire que je viens de te raconter. Elle aimerait que je passe à autre chose. Et moi, de mon côté, j'ai pris ce "défi" comme prétexte pour tester mon côté joueur, avant tout. Je ne pense pas pouvoir trouver l'amour ici, je ne viens pas dans cette optique, du moins il faudrait que je sois certain d'être prêt pour ça avant. » Le discours de Nicole, débité plus tôt, m'avait quand même poussé à la réflexion : effectivement il me fallait aller de l'avant, tourner la page comme elle le disait si bien. Ce ne serait pas facile, car tout de même j'étais resté meurtri par cette histoire durant sept longues années, m'empêchant ainsi d'aimer à nouveau, mais j’espérais pouvoir progresser, me soigner pour de bon. Cette histoire appartenait au passé, il me fallait vivre dans le présent. Je plongeai mes prunelles bleues dans les siennes. J'avais parlé de moi, mais ici nous étions deux. « Je me rends compte que je ne sais rien de toi Nicole. Parle-moi de toi, de ta vie ou de ce qui t'a toi aussi poussée à participer à ce jeu. Des choses à m'apprendre te concernant ? Des anecdotes dont me faire part, peut-être ? » Toute information était bonne à prendre. Que ce soit la raison de sa venue ici, son passé, ses passions,... je voulais en savoir plus sur ma jolie partenaire qui, plus que jamais ce soir, s'était montrée très à l'écoute. Je lui en étais éperdument reconnaissant. Jamais je n'aurais cru que Nicole me porterait tant d'attention, et irait jusqu'à me faire part de ses conseils. J'avais découvert une facette de ma partenaire qui me plaisait vraiment beaucoup. Enfin, j'avais l'impression que nos rapports allaient s'améliorer, et je ne désirais d'ailleurs que ça.

j'ai définitivement battu mon record.
encore désolée.

Résumons. Il s’était perdu. Le coup de « mes pieds m’ont guidé ici sans même savoir où j’allais » on ne me la fait pas ! Cette excuse c’est limite si je ne l’ai pas inventée moi-même. Liiimite. Mes yeux s’agrandirent du genre « oui c’est ça on y croit tous » puis Malikus enchainait sur les raisons de sa participation à Fake Lover. Pour les définir je dirais qu’elles sont… très particulières. La vie de ce mec est reliée à sa mère, c’est dingue. Je retrouvais en sa maternelle un peu de la mienne d’ailleurs. Si ma cousine n’avait pas été là je serais comme son frère à l’heure actuelle, mariée avec une personne dont je n’ai rien à carrer mais qui plait à maman chérie. En quelques mots : la mort. Tiens d’ailleurs est-ce que madame Malik était toujours en vie ? Non parce qu’elle a peut-être fait un infarctus en voyant avec qui son fils était tombé. Avec des mœurs aussi ringards elle devait me considérer comme une geisha ou truc du genre… ou peut-être même qu’elle me prenait pour Satan déguisé en fausse blonde. Je l’imaginais devant son post de télé à crier « Arrière Satanas ! N’approche pas ma chaiiire ! », alors bien sûr je ne pus m’empêcher de sourire ; amusée par mes propres pensées. Je ne peux pas lui en vouloir à la vieille égyptienne… les mamans ne sont pas toujours au point sur l’actualité, elles ont vécu sans l’internet ne l’oublions pas, du coup peut-être même qu’elle pense que je suis une messagère de l’empereur chinois. « Elle doit être choquée ta mère de voir avec qui tu es tombé. Tu me la présenteras quand on sortira ? Juste par curiosité. » Je veux vraiment savoir ce qu’elle pense de moi la mama, bordelasse ! « Mais cela dit je pense que tu as raison de résister contre son insistance. C’est ta vie pas la sienne, on est plus à l’an 50. » Elle doit encore plus me détester après ça. Ahlala elle m’obsède cette vieille femme que je ne connais même pas ! Tout comme elle a l’air d’obséder mon partenaire. Le pauvre, lui n’avait pas la chance d’avoir un acolyte qui l’aidait à dériver de ce chemin tracé par ses géniteurs. Justement, Malik s’intéressait maintenant à mon cas. J’aurais très bien pu faire la transition en mettant mon histoire en parallèle avec la sienne, ce qui aurait très bien collé. Sauf que je n’aime pas parler de moi comme ça ouvertement et il devrait plutôt s’estimer heureux que je sois aimable avec lui parce qu’en général je suis plus du genre bloc de glace à ne pas m’intéresser aux gens ; cette aventure me surprenait d’ailleurs dans le sens où je me découvrais un aspect social. Social, social… ahah, mais pas que. Il faut bien faire des efforts pour rester en course j’ai envie de dire. Pff, ça non plus je ne pouvais pas lui avouer ; être un minimum sympa alors que j’en pense pas moins sur chacun d’entre eux afin d’aller le plus loin possible. C’est méchant, je sais, mais c’est comme ça qu’on me définit dans la vraie vie. « Hmm… j’ai pas grand-chose à dire. Je suis venue ici pour toucher l’argent du gros chèque qu’ils donnent à la fin de la finale afin de lancer le projet qu’on a avec Teresy. J’aimerais bien t’en faire part mais on ne sait jamais quelle oreille peut trainer ici… ce serait bête que mon secret soit pété de la sorte. Et puis sinon … voilà. » Du blabla inutile, voilà comment je me sortais de ce genre de situation. J’aurais aimé lui dire que je n’affectionnais pas les gens en dehors de ma cousine et que si j’étais tant détruite par son élimination c’est bien parce qu’elle résumait à elle seule ma vie. Mes parents auraient été un sujet à aborder aussi, tant il y avait de choses à dire sur eux, mais je ne souhaitais pas attirer sa compassion ; ou encore moins sa sympathie parce que nos mères sont à demi similaires. Je balançais mes pieds, admirant mes chaussures et me demandant sur quoi je pourrais enchainer pour tout de même satisfaire son envie de me connaître un peu plus. « Tu connais déjà mon secret, c’est beaucoup. La preuve, je fais vraiment attention à ce que je dis quand je parle avec quelqu’un. Il a une grande importance dans ma vie. » Mes yeux se relevaient, affrontant son regard. Tourner autour du pot et mentir je fais ça très naturellement habituellement, mais là je ne savais pas quoi inventer pour tourner court à la discussion. « Une grande importance comme un enfant. Tu aimes les enfants? Moi pas. » Ok c'était un petit peu pathétique comme tournure, mais ça ferait l'affaire.