De base j'avais décidé de ne pas regarder du côté des proches en sachant que si je voyais de mes propres yeux l'absence de Ben la déception allait me faire perdre le fil du reste de la soirée, et ce n'était définitivement pas le moment d'être morose. Et finalement je me rendais compte que le fait qu'il soit là, à quelques mètres à peine, avait exactement le même effet, et que pendant un instant j'avais carrément décroché du truc pour ne penser à rien d'autre qu'au fait que ouais, il était là. Qu'il avait un boulot, un boss qui était un vieux con faisant le difficile à chaque fois qu'il voulait poser des congés, une frousse bleue de l'avion et une sainte horreur du décalage horaire, mais qu'il était là quand même. Du coup ouais, même si ça restait du domaine de la douce illusion l'idée de Lewis de passer outre monsieur sécurité pour traverser le plateau maintenant me paraissait tout de suite plus alléchante ; Lui en revanche, ne semblait qu'à moitié motivé par l'idée de jouer la diversion, on se demandait bien pourquoi, huhu. « Ouais non, je voudrais pas avoir ta mort sur la conscience tu as raison. C'est déjà un miracle que tu sois arrivé jusqu'ici en un seul morceau. » Non mais oui c'est vrai, avec tous les pièges qui devaient se cacher dans le nid pour un poissard comme lui. Un étang où se noyer, les grands escaliers du hall où se casser la figure, des plaques de cuisson où se brûler au troisième degré dans la cuisine, et la liste était encore longue. Si ça se trouve il n'avait jamais été aussi chanceux que depuis qu'il était à Fake Lover, et du coup c'était quand même con que tout cela se termine ce soir. D'ailleurs c'est ce moment là qu'avait choisi Cupidon pour nous adresser un dernier message, du genre qui sentait vraiment la fin et sans doute destiné à faire pleurnicher ceux qui avaient la larme facile. Bon, c'était pas mon cas, fallait pas non plus pousser la plaisanterie trop loin, mais c'est certain que ça faisait bizarre … J'avais beau avoir ronchonné pour tout un tas de choses les premières semaines, parfois plus pour la forme qu'autre chose d'ailleurs, mais il me plaisait bien finalement, ce nid. Bon, la gueule de chérubin enfarinée de Cupidon un peu moins en revanche, mais à mon avis y'avait bien qu'Eibhlin pour y trouver quelque chose. D'ailleurs la réflexion de Lewis à ce sujet m'avait arraché un sourire légèrement narquois, avant que Monroe ne m'interpelle à nouveau pour … Ah parce que fallait que je parle en plus ? Boon j'avais essayé de faire de mon mieux, même si j'avais surtout l'impression de m'être rendu ridicule, et je n'avais pas été mécontent de refiler le micro à Camille ensuite. Y'avait pas de raison, chacun son tour de galérer. D'ailleurs, il avait terminé son intervention rouge comme une tomate, mais c'était tout à l'image de Camille dans un certain sens, aussi cela ne m'avait arraché qu'un léger éclat de rire tandis qu'il se débarrassait à son tour du micro pour le filer à Henley. Fidèle à elle-même aussi soit dit en passant, mais elle me remerciait quand même de l'avoir supporté toutes ces semaines alors hey, c'était pas si mal ; Et puis ça va j'avais pas trop eu besoin de me forcer non plus. Elle était cool Henley, une fois qu'on avait compris que fallait la caresser dans le sens du poil. Lewis et Pavel avaient pris la suite, et après ça … Ah bah, c'était déjà les résultats, d'accord. Finalement il était passé vite ce prime, bientôt j'allais compter les secondes dans ma tête avant de retrouver Ben. C'était un peu ma ligne d'arrivée de la soirée là, ouais, mais d'accord avant c'était mieux de savoir qui gagnait, histoire qu'on ne soit pas tous venus là pour rien, hein. Pour être tout à fait honnête je songeais à un podium Camille – Lewis – Pavel, sans grande surprise ; C'était pas que j'avais pas confiance en Henley ou moi mais voilà. Du coup j'étais resté perplexe devant la place de cinquième de Pavel, et je ne parle même pas de celle de quatrième de Lewis. Ou alors c'était Alix qui ne savait plus compter et qui avait confondu la première et la dernière place, huhu. Oui bon, et maintenant Henley sur la troisième marche du podium, j'avais envie de dire que c'était carrément le monde à l'envers mais ce que je remarquais surtout c'était qu'il ne restait plus que Camille et moi. Est-ce que je me serais imaginé ça le premier soir, lorsqu'il était venu me demander d'un air penaud s'il pouvait partager le lit avec moi ? Assurément pas, mais ce soir j'avais l'impression de ne pas pouvoir rêver meilleur scénario tandis que sa main se resserrait autour de la mienne. C'était la première fois qu'un binôme traversait toute l'aventure pour arriver au bout ensemble, à ce que venait de dire Alix, et j'avouais ne pas être peu fier d'avoir accompli ça avec Camille ; C'était plus vraiment important ce que s'apprêtait à annoncer Alix, au fond. Enfin si, un peu, mais c'était plus le principal. Et d'ailleurs j'avais eu comme un bug au moment d'entendre mon prénom, comme si l'information refusait de monter directement à mon cerveau, tant et si bien que ce n'est que lorsque Camille m'avait serré dans ses bras et que des confettis nous étaient tombés dessus que j'avais compris. Enfin non, j'avais pas compris, vu que j'avais demandé d'un air limite hébété « J'ai … j'ai gagné ?? » Allo Akela ici la terre, il était temps d'atterrir, ouais. Mais c'était si inattendu que je ne savais pas comment j'étais censé réagir, surtout pas quand je ne sais qui m'avait poussé vers Alix pour que je récupère le chèque avec mon nom dessus et une somme que j'avais pas vu sur mon compte en banque depuis la belle époque où j'étais au sommet de ma carrière de sportif. Ce à quoi Camille n'avait d'ailleurs pas tardé à faire référence avec son histoire de billet d'avion « Comme si j'avais attendu ce chèque pour prévoir de te traîner jusque chez moi pour prendre des vacances. De toute façon je crois bien que j'ai embarqué deux ou trois trucs à toi dans ma valise, une espèce d'assurance, tu vois. » Ouais, du coup il serait bien obligé de ramener ses fesses un jour ou l'autre s'il souhaitait les récupérer. Quoi qu'il en soit nous avions fini par nous lâcher, fallait bien au bout d'un moment, et tandis que Camille se dirigeait vers Pavel j'étais resté moi les bras ballants, cherchant désespérément autour de moi … Avant de sentir quelqu'un arriver derrière moi et glisser une main le long de ma taille. Je l'aurais reconnue entre mille, cette main, et la chevalière qui y brillait. Et je n'avais donc pas eu besoin de vérifier l'identité du propriétaire pour me retourner et passer mes bras autour de son cou, mon visage s'enfouissant un instant dans sa nuque tandis que mes doigts glissaient dans ses cheveux en bataille. Benjamin était en train de me dire quelque chose, je crois, il était certainement en train de me dire quelque chose mais je n'entendais absolument rien, ou peut-être que je n'écoutais simplement pas vraiment, j'étais simplement bien trop heureux de le revoir, de le retrouver et de le serrer dans mes bras pour me soucier de quoi que ce soit d'autre l'espace d'un instant. Jusqu'à ce que je relève les yeux et croise le regard de Leilani un peu en rentrait « Kaikuahine Leilani 'ha'o wau ia 'oe ! » Oui, elle m'avait manqué, ma petite sœur, et y'avait bien que pour elle que j'avais accepté de lâcher un instant Benjamin pour la serrer dans mes bras et finir par murmurer à son oreille que cette fois-ci ouais, on allait vraiment l'ouvrir notre école, que l'argent n'était plus un souci à prendre en compte. Je ne savais plus trop où regarder ni ou donner de la tête, j'avais simplement repris la main de Ben dans la mienne avec la ferme intention de ne plus la lâcher pendant un bon moment, mais lorsqu'Henley était passée à ma portée je lui avais tout de même lancé « Hey ! Oublie pas, si être barbante suffit pas à ce qu'on te fiche la paix ma proposition tient toujours. On te trouvera bien un coin de jungle ou un sommet de cocotier où tu auras la paix. » et adressant un vague sourire à la jeune femme et la gamine qui accompagnaient la blonde j'avais reporté mon attention sur ma propre famille, en me disant que ouais, revenir vainqueur aiderait peut-être à me faire pardonner une absence qui s'était avérée plus longue que prévue. Après tout maintenant je pouvais bien dire que je n'étais pas parti pour rien, pas vrai ?

Je savais que les finalistes auraient un discours à faire, pourtant, je n’avais pas pensé au moment où Pavel lui, ferait son discours et se livrerait comme ça, sur cette scène, à propos de son aventure. Ce qui est un peu con, puisque c’était évident que ce moment arriverait. Je crois tout de même que Pavel ne nous fera pas un discours larmoyant avec une tonne d’émotions. Je pense le connaître assez pour savoir que ce n’est pas son truc, et surement devant tout ce monde qui crie à nous en casser les oreilles. Je reste nerveuse de ce qu’il pourra dire, à mon propos. Et finalement, je le fixe silencieusement, lui qui est si loin, alors qu’il avoue avoir eu des désillusions... des claques en pleine figure. Et ça, je crois que ça s’adresse bien à moi et personne d’autre. Enfin, peut-être d’autres, je ne sais pas, tout ce que je sais, c’est que je suis responsable d’une grande partie de ces désillusions et je le sais. Et je me sens mal. D’avoir finalement jouer comme ça. Alors qu’il était loin d’être un jeu et que malgré tout, malgré tout ça, il reste quelqu’un d’extrêmement important pour moi. Et d’un autre côté, je me dis que ce n’est pas plus mal si on passe moins de temps ensemble, que ça n’aide en rien à notre situation compliquée et que surtout j’arrêterais de le tourmenter comme j’ai le sentiment de le faire. Ce n’est pas le temps de m’en faire pour ce genre de chose, puisque c’est l’heure des résultats et je n’ai pas à attendre longtemps pour connaître le sort de Pavel. Qui termine cinquième. C’est pas sérieux... Merde. Enfin, pas que je considère que les autres ne méritent pas de gagner, c’est juste que bon... Pavel... Mon Pavel... Enfin. Je voulais qu’il gagne. C’est tout. Une moue délicate se forme sur les traits de mon visage, déçue aussi de voir Lewis se faire éliminer. Akela devient le grand gagnant de cette saison et on ne peut pas dire qu’il n’en est pas méritant. J’irai le félicité plus tard. Pour l’instant, c’est un peu la folie sur le plateau, India est allée rejoindre Lewis, et moi, sans savoir pourquoi, je reste dans mon coin, attendant le bon moment pour aller vers mon partenaire. C’est pourtant ce dernier qui vient vers moi et me surprend. Alors qu’il vient saisir ma main, je serre celle-ci en me glissant vers lui pour entourer ses épaules de mon bras libre. Tout ça. On dirait bien des adieux officiels et je ne pense pas être prête pour une telle chose. « Dis-moi qu'on va bel et bien rester en contact même si on s'éloigne l'un de l'autre... qu'on ne laissera pas passer des mois et des mois, j'tiendrai pas tout ce temps sans nouvelles de toute manière. » Mon coeur se serre à cette idée, puisqu’encore quelques minutes auparavant, j’étais entrain de me dire que la distance sera peut-être une meilleure chose pour nous. On en revient toujours à ça après tout. Mais je ne peux pas m’y résoudre. « Je te promet. Je te promet qu’on va continuer à se parler et qu’on va essayer de se voir le plus possible... » Même si ça ne sera pas facile, on va réussir, j’y crois. Je viens déposer mes lèvres sur sa joue en un doux et simple baiser avant de reculer pour ancrer mon regard au sien, souriant faiblement, venant glisser un bout de papier entre ses doigts. « Mon téléphone... Mon adresse à Washington, mon adresse courriel... Bref, tout ce qui te faut pour me donner des nouvelles et me rassurer en me disant que tu ne dors pas sur un banc de parc. » Parce que ça me tuerait de savoir qu’il dort dans la rue et il le sait, alors lui aussi il est mieux de me tenir au courant sur tous les détails de sa vie et où il est rendu. « Je... Bon... » Les gens sur le plateau commencent à se disperser, tout le monde célèbre la finale et je serre la main de Pavel un peu plus fort. « On... va prendre un verre ? » Oui, on est pas obligé de se séparer maintenant. Et on pourra parler de nos plans respectifs tranquillement, maintenant que nous sommes officiellement à l’extérieur du jeu. J’espère que ça ne dérangera pas à Cian que je prolonge ma soirée avec Pavel. J’expliquerai la situation, au pire. Pour l’instant je veux juste retarder notre séparation de quelques heures. Je l'entraine donc, avant même d'avoir eu une réponse, cherchant à quitter le plateau.